lundi 20 avril 2015

LE CONTRADICTOIRE ET LA COMMUNICATION DES DOSSIERS EN ASSISTANCE ÉDUCATIVE

Rapport au Garde des Sceaux, Ministre de la Justice

LE CONTRADICTOIRE ET LA COMMUNICATION DES DOSSIERS EN ASSISTANCE ÉDUCATIVE


Rapport du groupe de travail présidé par Jean-Pierre DESCHAMPS, Président du Tribunal pour Enfants de Marseille -Janvier 2001


En créant l'assistance éducative, le législateur de 58 conférait à ce qui n'était encore que la puissance paternelle dans le texte mais déjà l'autorité parentale dans la philosophie, une importance particulière en affirmant que seul le juge à l’exclusion de tout autre pouvait y porter atteinte.



Le Conseil d'Etat viendra, dans son rapport sur la protection et le statut de l'enfant en mai 1990, conforter l’importance de l’autorité parentale en affirmant que "le premier dispositif de protection de l'enfant instauré par la loi française est en réalité le statut de "mineur" fait à celui-ci, la relative incapacité dont celui-ci s'accompagne et son corollaire : les pouvoirs et les obligations conférés à l'autorité parentale".

Comme son intitulé l'indique, l'assistance éducative est d'abord une procédure d'aide à l'autorité parentale, les titulaires en étant les premiers requérants potentiels dont le juge doit "s'efforcer de recueillir l'adhésion”.

 Elle est aussi une forme de protection de l'enfant au nom de laquelle le juge peut ordonner la mise en place de mesures qui portent atteinte aux droits conférés aux père et mère: "droit et devoir de garde, de surveillance et d'éducation" (art. 371.2 du code civil).

Ces atteintes aux droits des parents, dans l'intérêt de l'enfant et pour sa protection physique et morale, pour justifiées qu'elles puissent être, sont génératrices d'inévitables traumatismes pour ceux qui en sont sujets ou objets dans la mesure où elles touchent à l'intimité des familles, à la dignité des parents, à la sécurité affective des enfants. Elles le seront d'autant plus qu’elles apparaîtront décidées arbitrairement et de façon non contradictoire.



C'est la raison pour laquelle, seule une autorité qui tire sa légitimité de la constitution et de la loi peut procéder à de telles atteintes : l'autorité judiciaire, parfaitement définie dans le commentaire de l'ordonnance du 28.12.1958 écrit en 1959 par Jean CHAZAL Président de Chambre à la Cour d'Appel de Paris et ancien Juge des Enfants. "Parce que judiciaire, elle confère aux familles et aux mineurs l'ensemble des garanties que tout justiciable est en droit d'attendre de la justice de son pays :
"Parce que judiciaire, elle confère aux familles et aux mineurs l'ensemble des garanties que tout justiciable est en droit d'attendre de la justice de son pays :
- Garantie d'indépendance d'abord, le juge dans sa fonction juridictionnelle ne recevant de directives ni du pouvoir exécutif ni des autorités administratives ;
- Garantie résultant du caractère "légal" de l'intervention, ainsi que nous l'avons déjà signalé
- Garantie dans l'exigence de la preuve des faits qui motivent l'intervention (conduite asociale ou d'opposition d'un mineur, sévices ou privation de soins, circonstances psychologiques, familiales, économiques ou sociales qui font que l'enfant est livré à lui-même ou en état de carence...) ;
- Garantie enfin dans le fait que le débat devant le juge doit avoir un caractère contradictoire, l'ordonnance du 23 décembre 1958 disposant que "le mineur, ses parents ou gardiens peuvent faire choix d'un conseil ou demander au juge des enfants qu'il leur en soit désigné un ".

Mais affirmer le caractère judiciaire de l'intervention, c'est aussi savoir lui donner ses limites L'indépendance des Juges est sans doute un sujet récurrent, mais n'est pas l'objet de ce groupe de travail sauf à préciser que l'indépendance est d'autant plus forte qu'elle est nourrie de formation initiale et continue et de garanties statutaires qui mériteraient d'être examinées notamment en ce qui concerne le déroulement des carrières : le juge des enfants par ses fonctions spécialisées et territorialisées est appelé à mettre en place des politiques publiques. Cette fonction doit être prise en compte par les services judiciaires comme préparant naturellement ce magistrat à d’autres fonctions de responsabilité tant au siège qu’au parquet.

Le caractère légal de l'intervention de ces mêmes juges ne nécessiterait pas d'étude particulière de ce groupe si les faiblesses de l'organisation judiciaire et des moyens mis en oeuvre, mais aussi certains vides juridiques, n’entraînaient les juges vers des pratiques qui s’éloignent des principes généraux du droit civil, portant gravement atteinte aux droits des familles sans que cela puisse faire l'objet de la censure naturelle de l'appel dans des conditions satisfaisantes


A SUIVRE ...

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